Hanks Kend [Etage 4 HLM n°4]

La nuit s'était apposée sur le paysage comme un sombre voile de terreur aveugle, impalpable. L'air vibrait d'une tension sourde, lourde et oppressante, qui pesait sur la nuque des hommes encore en vie, alors que les rythmes cardiaques s'accéléraient. Il n'y avait pas un souffle de vent, et la lumière blafarde des lampadaire renvoyait sur les façades et le bitume d'étranges et mouvantes ombres, alors que le linceul de pénombre s'épaississait.

C'était une nuit parfaite pour la chasse.

Hanks et ses hommes étaient en faction dans l'immeuble portant le numéro 4. La plupart regroupés dans le hall principal, un homme avait été placé en vigie au sommet du bâtiment, un autre à une fenêtre du 4ème étage, et dans le silence pesant, les autres membres de l'escouade attendaient, tel des gargouilles de pierre, qu'un intrus passe à proximité de leur serres.

L'air avait vibrer plus fortement, renvoyant les sourdes vibrations d'un moteur et le crissement des roues sur le bitume. Les sombres gardiens n'avaient pas bougé, demeurant dans l'ombre, alors que le bruit s'intensifiait.
La cage d'ascenseur du hall s'était éclairée, et le lumignon du quatrième étage s'était allumé. La machine avait alors commencer sa lente ascension, ses grincements assourdis par la parois des murs du bâtiment.
Un intru dans le parking, voilà ce que ce signal voulait dire.

-"Jenkins, Conrad", fit une voix sourde, presque un grincement, "allez voir ce qui se passe."

Un UBCS se redressa, un autre sorti du couloir, et, sans un mot, ils allèrent se poster à la porte, sombres silhouettes presque invisibles, impalpables, enveloppés de la noirceur de la nuit. Silencieux, il se placèrent de part et d'autre de la grande porte d'entrée, échangèrent de bref signe, l'un d'entre eux revint vers ses homologues, toujours immobiles.

-"Deux véhicules alliés, il s'agit sans doute d'une équipe de récupération."
-"Combien d'hommes ? interrogea l'homme à la voix grinçante."
-"Six."
-"Très bien Jenkins, rappelez l'ascenseur afin d'avertir Hugues qu'il n'y a pas à s'inquiéter."
-"A vos ordres."

Un autre code mis au point par l'équipe de surveillance du laboratoire d'Umbrella, afin de limiter au maximum les émissions radios. Leur mission comportait les mots clef "Silence, discrétion, efficacité", et le groupe s'y était employé à merveille. Pas question de risquer d'être découvert par une captation hasardeuse de leurs communications.

L'ascenseur entama une descente retour, l'inactivité des logos lumineux indiquant les étages indiquait qu'aucun imprévu n'était à signaler. Un bruit sourd et creux, annonçant l'arrivée de la cage métallique, marqua une nouvelle période de silence. Le temps continua de s'écouler.

Pour un bourdonnement perça l'air, faisant vibrer les fenêtres et des vitres de la porte. D'abord lointain, il s'amplifia rapidement jusqu'à devenir d'un proximité alarmante. Un hélicoptère survolait la zone. Les voyants de l'ascenseur s'allumèrent, indiquant un appel du quatrième et du dernier étage.

-"Jenkins, rejoignez Conrad."
-"Oui monsieur."

L'UBCS rejoignit son homologue, resté à la porte. Il échangèrent quelques mots à voix basse. Puis Jenkins revint, rapide et furtif.

-"Débarquement de BSSA, on dénombre 4 hommes, probablement une équipe d'intervention."
-"Enfin ..."

Un ricanement grinçant se fit entendre.

-"Parfait, rejoignez Conrad et attendez le signal."

Une forme se détacha du mur, et commença à se déplacer.

-"Kurt, rejoignez Edward sur le toit, mettez le au courant des consignes. Je rejoins Hugues, ne faites rien jusqu'à nouvel ordre, vous connaissez le signal."

Les ténèbres se mirent en mouvement.

[...]

Quelques minutes s'étaient écoulées. Les BSSA se trouvaient à présent dans un parking, regroupés autour d'une voiture. Il était évident qu'il n'avait pas l'intention de rester à découvert, ce qui était tout à leur honneur. Posté à la fenêtre centrale du bâtiment, au quatrième étage, Hanks installait son fusils de précision, ajustant le trépied, placé sur le rebord de la dite fenêtre.
Par mesure de sécurité, les stores avaient été abaissés par le colosse nommé Hugues, la fenêtre se confondait alors parfaitement avec l'hétérogénéité des ouvertures du bâtiment. Ce dernier homme était en faction dans le couloir, prêt de la porte, après s'être assuré de la sécurité de l'appartement dans lequel le sniper se postait.

Ajustant son arme, orienté en diagonale sur un côté de la fenêtre, placer de profil afin de faire passer le canon entre le cadre et le store baissé, l'USF plaça son œil en face de la lunette et ajusta ses réglages à travers la vitre ouverte. L'activité fébrile de ses ennemis ne lui arracha pas un sourire, il se contenta d'attendre. Maintenant sa respiration à un rythme régulier, malgré l'exaltation farouche qui l'envahissait peu à peu. Il braqua son arme vers les BSSA qui s'activaient dans le parking.

Il y eut un bruit de succion alors qu'il se mordait la lèvre derrière son voile de jute, un sourire carnassier dessiné sur le visage.

Comme un chat ramassé sur lui même, il titilla la gâchette de son fusil d'ors et déjà chargé et calibré. Réprimant un frisson d'extase, il orienta sa lunette et étudia la scène, guettant le moment où il pourrait frapper, une seule et unique fois, redoutable mais pas mortel ... le chat se devait de jouer un peu.

-"Plouf plouf ... à trois ce sera toi, un, deux ..."

Concentré, il chercha le point faible, le moment d'agir, car seul le moment comptait, la cible n'avait aucune importance. Il imagina déjà la rotule de sa future cible exploser, et son regard alors qu'elle s'effondrerait dans un accès de stupeur et de souffrance mêlée. Bien que non mortelle, cette blessure très handicapante suffira à ajouter un peu de suspens dans le jeu. Si l'hémoragie pouvait être en effet rapidement contrôlée, la souris ne pourrait pas récupérer l'usage de sa jambe avant longtemps ... Le jeu avait commencé, et Hanks tirait la première paire de dès.

-"... trois ..."

Sa respiration se bloqua, et son doigt pressa la détente.

La nuit n'était plus silencieuse, et le souffle du vent vibrait encore du fantasmatique et déchirant son de la détonation de la poudre. Un frisson de plaisir parcouru une échine, l'adrénaline étrangla un cœur froid, et dans la lueur blafarde des lampadaire, la proie s'écroula.

La chasse avait commencé.

Dans une petite pièce du quatrième étage de l'HLM 4, le silence reprit peu à peu ses droits. Un silence tendu, uniquement rompu de manière intempestive par la respiration légère de l'UBCS nommé Hugues et le roulement métallique de la douille sur le sol. Un souffle raide retentit soudain, et un ricanement grinçant agressa les oreilles de l'obscurité. Un soupir de contentement, et l'expression d'une joie malsaine.

Le silencieux. Il avait oublié le silencieux. La nuit promettait d'être belle, excitante. Il n'avait pas ressenti ça depuis bien longtemps. Se reprenant en réprimant un second frisson, Hanks se repencha sur son arme, bien décidé à étudier ses proies de plus prêt, goutter la saveur de leur vision, et voir apparaître sur leur visage la lente et légère métamorphose que la terreur imprime sur les traits humains.

A travers sa lunette, il étudia chacun de leur mouvement, la manière dont ils se déplaçaient, nouant affectueusement les liens vibrant qui unissent le traqueur à sa proie, ceux qui font vibrer le coeur du survivant alors qu'ils se brisent, comme une corde tendue, sciée lentement, consciencieusement. Il les détailla tour à tour, alors qu'ils s'activaient afin de rejoindre l'abri des 4x4. Apparemment il avait touché le médecin du groupe ; un sourire s'étira autour de la grimace sadique provoquée par une canine plongée dans la chair d'une lèvre. La nuit promettait d'être unique.

Un bruit de succion écœurant se fit entendre.

Un étrange son vint cependant rompre ce moment d'exaltation propre au chasseur, car l'ascenseur se remit en mouvement. Un sourcil interrogateur se relèva derrière un masque voilé, détournant un instant le regard appuyé de Hanks. Il montait, peut être un nouvel arrivant du côté des airs ... Sans porter d'avantage d'attention à cet élément mineur, le sniper se pencha à nouveau sur son arme, l'œil dans l'alignement de la lunette.

-"Hugues ... allez voir si l'appel viens bien du dernier étage. Dans le cas contraire, veuillez entamer la procédure classique."

Il n'était pas rare en effet que des civils sortent comme des rats effrayés de quelques recoins inexplorés du bâtiment. La procédure était alors simple, surtout quand ils se servaient de l'ascenseur. Un UBCS appelait l'ascenseur, qui ne manquerait pas de s'arrêter à l'étage concerné, et descendait sans sommation le civil une fois la porte de la machine ouverte. Selon les circonstances, la capture pouvait se révéler plus instructive, mais on faisait rarement de prisonnier dans ce sombre mécanisme.

Les proies étaient maintenant autour du 4x4, et ne tardèrent pas à se mettre à couvert. Aucun doute, ils envisageaient de rentrer dans le bâtiment d'à côté. Étrange ... mais il n'était pas indispensable de comprendre pour agir. Une autre équipe d'UBCS était en faction dans le dit bâtiment, retardé l'entrée des BSSA, ou brusqué leur action, était une manœuvre indispensable.

Tension est amie de l'erreur, et jusqu'à présent, cette équipe avait toujours promptement réagit. Il convenait donc de faire monter la pression. Le sourire s'étira, un second bruit de succion aspira le silence.

Ignorant leur formes sombres dissimulées derrière la masse noire d'un 4x4, Hanks décala doucement son viseur sur le véhicule. Bloquant sa respiration, il appuya sur la détente.

Déclenché l'alarme du véhicule devrait être un bon moyen de faire monter la pression ... d'autant que la lumière produite par le 4x4 devrait être suffisante pour placer un second tir bien handicapant dans l'épaule d'une des proies. Sans oublier qu'elle produirait un effet de surprise et de peur, déconcertant, déconcentrant. L'adrénaline monterait alors très rapidement, et le chasseur était curieux de voir comment ses nouveaux amis réagiraient à ce mouvement ... et combien de temps durerait l'assurance de leur chef face à la promesse d'une mort certaine ... et celle de l'arrivée prochaine de monstres avides d'entrer dans la danse., attirer par cette douce musique

La nuit promettait.